Cahier de citations
Il existe une certain pro-Principe royal,
pro-dénué d’intelligibilité, pro-dénué de substance et pro-doté de rotondité, que j’appelle Citrouille. Avec cette Citrouille coexiste une Puissance que j’appelle encore Supervacuité. Cette Citrouille et cette Supervacuité étant un, ont émis, sans émettre, un Fruit visible de toutes parts, comestible et savoureux, Fruit que le langage appelle Concombre. Avec ce Concombre coexiste une puissance de même substance qu’elle, et que j’appelle encore Melon.
Je ne me consolerais pas
de jeter ça et là quelques idées si je n’en tirais un usage immédiat dans la conduite de ma vie quotidienne. Façonner les circonstances afin que le désir y habite – ou du moins s’y appliquer – réclame une patience et une opiniâtreté d’alchimiste, une humilité sans pareille, une absence totale d’orgueil et de présomption.
Je ne crois en rien,
je n’adhère à aucune croyance, il se mêle assez d’incertitudes à mes pensées pour révoquer toute adhésion à quelque vérité que ce soit. Je démêle mes passions, j’identifie mes désirs, je tente de les affiner et de les harmoniser en sorte que leur accomplissement prête à mon existence cette plénitude que le bonheur amoureux a le privilège d’illustrer sans détours. Je n’obéis qu’à une seule sollicitation : vouloir, pour les autres et pour moi, que le plus heureux m’échoie. Je le veux sans autre raison que la sereine raison de l’enfant : parce que j’en ai envie.
J’invoque
le solipsisme insensé, la folie de l’incomparable, la réalité d’être unique. Je veux être là et aller sans savoir où je vais, comme si mes pas savaient.
Qui regarde toujours,
pour savoir la suite, n’agira jamais, et tel doit bien être le spectateur.
En revanche,
se rendre disponible au présent et lui demander autant d’occasions actives de connaître les signes caractéristiques du plaisir – la volupté qui chatouille agréablement les sens, pour le dire comme Cicéron -, voilà une définition de l’hédonisme. Pure présence disponible au monde, capacité d’accueil des voluptés et des joies, adhésion au réel, autant de façon de se guérir des souffrances psychiques, tâches auxquelles Aristippe assigne la philosophie.
Quand on se plaint
de la méchanceté d’autrui, on oublie cette autre méchanceté plus redoutable encore, celle qu’auraient les choses s’il n’y avait pas autrui. Il relativise le non-su, le non-perçu ; car autrui pour moi introduit le signe du non-perçu dans ce que je perçois, me déterminant à saisir ce que je ne perçois pas comme perceptible pour autrui. En tous ces sens, c’est toujours par autrui que passe mon désir, et que mon désir reçoit un objet. Je ne désire rien qui ne soit vu, pensé, possédé par un autrui possible. C’est là le fondement de mon désir. C’est toujours autrui qui rabat mon désir sur l’objet.