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L’architecture contemporaine
est souvent production de célébrités – générant en province ces clones, qui se constituent une gloire locale en pillant les magazines spécialisés et en recopiant plus ou moins précisément les dessins qui triomphent sur le restant de la planète. Le style cosmopolite définit la patte d’une poignée d’architectes actifs sur le globe, chacun se marquant formellement à la culotte. Peu de ruptures franchement lisibles dans ce monde uniforme qui réplique et duplique l’uniformisation planétaire des goûts et des modes de vie. Un même bâtiment pour tous ? Le rêve de tous les régimes totalitaires qui n’en espéraient pas tant pour nourrir la servitude volontaire.
Quand il entra dans le marché aux pantoufles,
il était sur le point de se convaincre que c’était lui, et non la ville, qui avait changé. Ce qui était impossible, puisqu’il avait percé le secret de la ville, il l’avait décidé dès le moment où il avait pu déchiffrer les lettres sur son visage. Planté devant la vitrine d’un marchand de tapis, quelque chose le poussa à croire qu’il avait déjà vu les tapis exposés, qu’il y avait posé le pied, des années durant, avec des souliers crottés ou de vieilles pantoufles ; il connaissait bien, se disait-il, le marchand qui buvait du café sur le seuil de son échoppe, et qui le surveillait d’un oeil soupçonneux ; l’histoire, pleine de petites fraudes et d’escroqueries sans envergure, de cette boutique qui sentait la poussière, lui était, semblait-il, aussi familière que sa propre vie. Il eut la même impression devant les vitrines des orfèvres, des antiquaires et des marchands de chaussures. Deux ruelles plus loin, il se dit encore qu’il connaissait toutes les marchandises qui se vendaient dans le Grand Bazar, depuis les aiguières de cuivre jusqu’aux balances à fléau ; tous les vendeurs guettant le chaland derrière leur comptoir, tous les passants. Toute la ville d’Istanbul lui était familière ; elle n’avait plus aucun secret pour lui.
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N’appelle-t-on pas “cinéma”,
désormais, de manière frauduleuse, des réalisations audiovisuelles qui ne sont en réalité que des téléfilms, produits par des chaînes de télévision françaises, pour elles, et selon leurs normes ? Si l’on continue à nommer cela “cinéma”, et à pratiquer l’hypocrite fiction du “passage en salles”, n’est-ce pass avant tout pour permettre à ces produits d’obtenir des subventions, et accroître ainsi les profits des chaînes qui les commandent ? Il y eut un art, en somme, qui sut, comme tous les arts, développer un langage spécifique, formidablement riche et varié, créer une esthétique, de la beauté, et élargir notre intelligence du monde : c’est tout cela qui semble liquidé, dès lors que le “cinéma” devient, deplus en plus, une marchandise comme les autres.
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– Mourir !
répéta Cora d’un ton plus calme et plus ferme ; la mort ne serait rien ; mais l’alternative est horrible ! Il veut, continua-t-elle en baissant la tête de honte d’être obligée de divulguer la proposition dégradante qui lui avait été faite, il veut que je le suive dans les déserts, que j’aille avec lui joindre la peuplade des Hurons, que je passe toute ma vie avec lui, en un mot que je devienne sa femme. Parlez maintenant Alice, soeur de mon affection, et vous aussi major Heyward, aidez ma faible raison de vos conseils. Dois-je acheter la vie par un tel sacrifice ? Vous, Alice, vous, Duncan, consentez-vous à la recevoir de mes mains à un tel prix ? Parlez ! dites-moi tous deux ce que je dois faire ; je mets à votre disposition.
– Si je voudrais de la vie à ce prix ! s’écria le major avec indignation. Cora ! Cora ! ne vous jouez pas ainsi de notre détresse ! Ne parlez plus de cette détestable alternative ! La pensée seule en est plus horrible que mille morts !