Sauf qu’on peut opter pour une compassion retenue, privée, intime, et ne pas tenir pour digne cet affichage de larmes, de cris, de pleurs, de sanglots, le tout en présence des caméras et des photographes. L’affichage de compassion n’est pas forcément preuve de compassion, mais il est toujours preuve d’affichage. Après La Rochefoucauld et les moralistes français, Nietzsche nous a appris à nous méfier de la compassion : elle est souvent l’une des modalités de l’amour de soi : Dieu qu’on se sent grand quand on se fait petit ! Dieu qu’on est orgueilleux quand on affiche sa modestie ! Dieu qu’on est égoïste quand on fait un spectacle de son amour des autres ! Laissons là le narcissisme de notre époque qui fait de l’exhibition de son pathos une valeur supérieure à l’exercice de la pensée.